L’édito de la semaine, le 17 Septembre 2023

Commentaire de l’Evangile du Jour (17 Septembre 2023, 24ème dimanche du Temps Ordinaire) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« ‘Serviteur mauvais ! je t’avais remis toute cette dette parce que tu m’avais supplié. Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ?’ » (Mt 18,32-33) dit Jésus dans l’Evangile de ce dimanche. Cette parabole est très éclairante, car elle met en lumière l’agir de Dieu par rapport aux hommes et, hélas, celui bien différent des hommes entre eux. 

Tout d’abord, elle permet de bien saisir la différence incommensurable entre ce que les hommes doivent à Dieu à cause de leurs péchés et ce que nous doivent ceux qui nous font du mal. De fait, le premier serviteur doit à son maître une somme tellement énorme (soixante millions de pièces d’argent), qu’elle parait tout bonnement impossible à rembourser. Le maître est tout simplement saisi de pitié pour ce serviteur, qu’il lui remet, dans sa bonté, toute sa dette. Or, ce même serviteur, sortant de chez son maître, rencontre l’un de ses compagnons, qui ne lui doit qu’une petite somme de cent pièces d’argent, autrement dit une somme ridicule face à la somme colossale de soixante millions de pièces d’argent que le serviteur doit à son maître. On comprend tout de suite que le mal que l’on peut nous faire n’a rien de comparable avec le péché que les hommes commettent envers Dieu (on reconnaît, bien sûr, dans la figure du maître celle de Dieu). On ne peut donc pas reprocher à quelqu’un son mal envers nous, si d’abord nous ne commençons pas par prendre conscience de notre péché envers Dieu. Si je reproche le mal que mon frère me fait et donc j’exige que justice soit faite, alors, je dois accepter que, moi-même pécheur, Dieu exige que s’applique pour moi sa justice. La première leçon que nous donne Jésus, c’est donc de prendre conscience de nos péchés avant de voir le mal que nous font les autres, ce qui nous conduira ainsi à faire preuve d’humilité. C’est absolument essentiel pour faire la vérité en nous. De fait, l’humilité, c’est faire la vérité en nous, puisqu’elle nous donne la connaissance de ce que nous sommes devant le Créateur, qui se révèle être le Sauveur : une créature qui ne peut exister sans son Créateur, et de plus, une créature blessée par le péché, qui a besoin de son Sauveur pour être sauvée. 

D’autre part, la parabole met en avant la grande différence du traitement que Dieu nous donne et celui que l’on réserve à ceux qui nous ont fait du mal. Spontanément, Dieu est toujours enclin à faire miséricorde, à effacer notre dette car il nous aime et a pitié de nous. Au contraire, nous les hommes, nous sommes très à cheval sur l’injustice, qui nous touche, et prêt à dégainer la sanction pour punir ceux qui nous font du mal. Force est de constater, que plus on s’éloigne de Dieu, moins la vision est claire sur nos manquements et nos péchés, qui sont autant d’injustices non seulement envers Dieu, mais aussi envers notre prochain. Ainsi, la seconde leçon, c’est, qu’à l’image de Dieu, et donc en faisant preuve d’humilité comme nous l’avons vu dans la première leçon, nous sommes invités au pardon et à faire preuve de miséricorde. Précisément, l’humilité du coeur permettra à celui-ci d’être en capacité de recevoir la miséricorde de Dieu et de la donner à notre prochain qui nous a fait du mal. On sort ainsi de la spirale de désirer la justice à tout prix pour nous, mais qui déconnectée de la miséricorde, se transforme en règlement de compte et donc inéluctablement en une injustice. Ainsi, la justice sans la miséricorde devient souvent elle-même une injustice, car elle blesse plus qu’elle ne répare et produit aussi bien dans le coeur de celui qui l’inflige que de celui qui la reçoit le sentiment profond d’un coeur blessé, donnant part au poison de l’âme qui est l’orgueil. On en revient toujours à ces deux facultés spirituelles de l’âme que tout homme possède : l’intelligence et la volonté. De fait, par l’humilité éclairant son intelligence, l’homme connaît la vérité de ce qu’il est et chasse donc le mensonge en lui de ce qu’il n’est pas. Par la volonté, l’homme aime la vérité, qui est Dieu, et ainsi évite de tomber dans l’orgueil de se glorifier lui-même comme son propre dieu, ce que, bien sûr, il n’est pas, autrement dit lui évite d’aimer le mensonge.

Implorons notre Mère du Ciel, la Vierge Marie, qui de manière incomparable, par son humilité et sa charité, n’a cessé de chercher Dieu et de l’aimer. Elle est, par sa prière d’intercession, notre plus sûr guide, comme l’a voulu Jésus en nous la donnant pour mère, pour que nous puissions résolument prendre le chemin du ciel. Elle nous apprend par sa prière « le sens de Dieu », de le mettre au coeur de notre vie et ainsi, elle nous fait entrer dans la dimension de la Miséricorde divine, qui est la vraie mesure de notre rapport à Dieu et à celui de nos frères.

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