l’édito de la semaine, le 4 Septembre 2022

Commentaire de l’Evangile du Jour (4 Septembre 2022 23ème dimanche du Temps Ordinaire) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Celui d’entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. » (Lc 14,33). Certes, c’est déjà énorme, mais lorsque Jésus dit : « Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. » (Lc 14,26), là, on prend la mesure de la radicalité de l’Evangile. Jésus n’y va pas par quatre chemins. La radicalité à laquelle il appelle  ses disciples est telle qu’elle paraît tout simplement impossible à vivre pour beaucoup. Jésus demanderait-il donc de moins aimer les siens pour lui donner toute la place ? Non, il n’a pas dit d’aimer moins les siens que lui, il a demandé de le préférer aux siens, ce qui n’est pas la même chose. Il n’est pas dans le moins, mais dans le plus, toujours dans le plus. Cependant, ne nous méprenons pas. Il ne demande pas un parcours de combattants à des personnes qui sont dans l’incapacité physique de poser un pas devant l’autre. Il demande toujours à la hauteur de ce que chacun peut donner, et cela appuyé par sa grâce, car il ne peut pas envoyer ses disciples dans le monde sans l’équipement ultra nécessaire qu’est la grâce. Or, il semble demander à tous, et sans exception de le préférer aux siens. S’il le demande, c’est donc que c’est bien à la portée de tous. Beaucoup vont répéter à l’envie, que cela est impossible pour eux. Certes, sans une vie de foi, de vie spirituelle, autrement dit de vie de disciples, c’est carrément impossible. Néanmoins, quoi qu’on en dise, l’homme est fait pour aimer jusqu’à cette radicalité. C’est le propre de l’homme d’aimer jusqu’à donner sa vie. Cela en fait sa grandeur, la beauté de son âme. Tout le monde, quelles que soient les convictions de chacun, mesure la grandeur d’une personne au don de sa vie. Quelqu’un qui donne sa vie pour sauver quelqu’un d’autre est toujours reconnu comme une bonne personne aux yeux de tous. Aussi, Jésus appelle à le préférer lui car il est Dieu, celui qui m’a créé et qui me sauve, celui qui est l’amour même, celui qui sans lui l’amour n’existerait pas. Nombre de saints et de martyrs ont donné sans compter leur vie, car ils en avaient pesé la grandeur et la profondeur, que nul amour humain, aussi grand soit-il, ne peut rivaliser, tant l’amour de Dieu est de l’ordre de l’absolu. Notre vie, notre existence de chaque seconde, notre salut, notre bonheur éternel en dépendent totalement. Sans lui, nous n’existerions pas. Il n’est pas comme une personne humaine, qui nous est chère, que nous apprenons à connaître et aimer, mais si nous ne l’avions pas connu, nous aurions pu également vivre heureux. Or sans lui, Dieu, le Dieu fait homme, c’est littéralement impossible, car on ne peut connaître un quelconque bonheur éternel, ce pour quoi nous avons été créés, en dehors de Dieu. En renonçant à un tel amour, autrement dit devenir disciple, on renonce au bonheur éternel, puisque celui-ci n’est autre que de vivre cette radicalité de l’amour, qui, dans le ciel, est la mesure de toute vie éternelle.

La Vierge Marie et les saints peuvent nous aider à comprendre cette radicalité. Quand Jésus dit : « Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple. » (Lc 14,27), cela veut dire refuser d’aimer au prix de sa vie. Qui pourrait dire que quelqu‘un m’aime vraiment si cette personne n’est pas prête à m’aimer au prix de sa vie ? Le monde nous a trop habitués à aimer de sentiment, de ce que l’autre m’apporte, sans considérer comme la norme incontournable de tout amour le don de soi, le don de sa vie. Aimer, c’est naturellement se donner et recevoir, c’est se tourner vers l’autre. Jésus, sur la Croix, à n’en point douter, a donné sa vie, non pas par plaisir ou quelconque intérêt, mais bien par pur amour, qui s’est exprimé dans la radicalité du don de sa vie et au prix d’une souffrance innommable.

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