L’édito de la semaine, le 5 Mai 2024

 Commentaire de l’Evangile du Jour (5 Mai 2024, 6ème Dimanche de Pâques) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Jn 15,12-13) dit Jésus à ses disciples. Le message est clair. Tout d’abord, Jésus donne un commandement et non un conseil. Tout commandement s’adresse à la volonté de chaque homme, qui met en application le commandement, et réclame l’obéissance, aussi bien dans la qualité de l’écoute que dans celle de la mise en pratique. L’obéissance demande la compréhension de ce qui est demandé et non pas seulement une exécution sans réflexion. De fait, « obéir » veut dire écouter ce qui m’est dit : « ob »: ce qui vient à moi et « audire » : écouter. Trop souvent, l’obéissance a été réduite à une application d’un ordre arbitraire. Or, Dieu s’adresse à l’homme, qu’il ne considère pas comme un esclave, mais plutôt comme un ami, si celui-ci fait ce que Jésus demande : « Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. » (Jn 15,14-15). On le voit, nous sommes très loin d’un esclavage, d’une application servile à un ordre qui pourrait être qualifié d’arbitraire, d’une soumission à un dieu punisseur. Bien au contraire, Jésus demande à l’homme d’accueillir la volonté divine : « Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. » Jn 15,14). Ainsi, un constat que nous pouvons observer, c’est qu’obéir à un commandement pour Dieu n’est pas réduire l’homme à un exécutant sans cervelle, mais, au contraire, faire de lui un ami, même, plus que cela, faire de lui un fils, tout comme l’est le Fils éternel du Père, lui qui dit de lui-même : « Il faut que le monde sache que j’aime le Père, et que je fais comme le Père me l’a commandé. » (Jn 14,31). Il fait ce que le Père lui a commandé et c’est pour cela d’ailleurs qu’il est le Fils éternel. Il ne cesse de faire ce que le Père commande, au point de partager éternellement, sans commencement et sans fin, l’être du Père. Tout cela peut paraître étrange pour nos contemporains, pour qui les mots ont perdu beaucoup de leur sens originel, mais une fois compris donnent une saveur inestimable.

Ensuite, après avoir saisi le sens de ce qu’est le commandement que Jésus demande à ses disciples, il nous parle du contenu de ce commandement : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » (Jn 15,12). Le commandement est d’aimer, mais pas de n’importe quel amour, celui de nous aimer comme lui-même nous aime et de la manière suivante : en donnant sa vie pour les autres : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Jn 15,13). C’est, bien évidemment, ce qu’il fit sur la Croix pour nous tous. Ainsi, l’amour est commandé et l’amour est un don de soi et, bien sûr, aussi l’accueil du don de l’autre (donner et recevoir vont de pair). Cela est d’une importance capitale, car il permet de comprendre le sens de la parole de Jésus : « Il faut que le monde sache que j’aime le Père, et que je fais comme le Père me l’a commandé. » (Jn 14,31). De fait, l’amour est commandé, car il constitue le coeur même de ce qu’est la filiation du Fils de Dieu. Il est Fils, car il reçoit tout l’amour du Père (c’est le commandement du Père), au point que l’être des deux personnes est unique (ce qui est donné et reçu ne font qu’un), auquel il convient de rajouter la personne du Saint Esprit. Ainsi, il y a trois personnes en un seul Dieu, car Dieu est amour. Or, pour l’homme, appelé à obéir au commandement d’amour de Jésus dans l’Evangile, cela lui permet précisément de devenir fils de Dieu par adoption, et ainsi donc de vivre la condition de vie du Fils éternel du Père. Aussi, plus l’amour du don de soi et de l’accueil du don de l’autre est grand chez l’homme, plus il vit ce que le Fils éternel du Père vit dans le sein de la Sainte Trinité. Ceci est vraiment prodigieux et d’un poids incommensurable pour les hommes, qui découvrent qu’ils ne sont pas des pantins au service et soumis à un dieu assoiffé de pouvoir, mais, au contraire, ils sont appelés à vivre la grandeur de ce que le Dieu Trinité vit lui-même.

La Sainte Vierge Marie et les saints ont saisi cette grandeur du mystère du commandement et ils se sont appliqués à en vivre au mieux pour goûter, dès ici-bas, la vraie richesse, celle qui ne passe pas. L’homme a été créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, il n’est donc pas si étonnant, qu’avec la grâce que Jésus a méritée sur le bois de la Croix, l’homme trouve sa joie et son bonheur en Dieu, en vivant ce que lui-même vit.

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