L’édito de la semaine, le 25 Septembre 2022

Commentaire de l’Evangile du Jour (25 Septembre 2022, 26ème dimanche du Temps Ordinaire) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. » (Lc 16,31) dit Jésus dans la parabole du riche et du pauvre Lazare. 

Tout d’abord, Jésus nous montre que la fortune de l’homme riche de la parabole conduit à grand dommage pour l’âme : la personne pense être en sécurité, à l’abri de tout manque, sans mesurer que face à la mort, il n’y a aucune parade. La mort met fin à toutes les sécurités que la personne a pu élaborer et laisse l’âme dans un grand désarroi, lorsque Dieu en a été absent. Au contraire, le pauvre Lazare a souffert de la faim, d’une grande pauvreté et d’une maladie qui ruinait son corps. Le sort semblait s’acharner sur lui, mais son âme avait trouvé refuge en Dieu. Il avait trouvé sa consolation en Dieu son Sauveur. Voilà la grande différence entre les deux : le riche ne compte que sur sa fortune pour parer à tout mais le pauvre se repose en Dieu ; car, en lui seul, il trouve le repos, que le monde ne peut lui accorder même pour son corps, affamé et couvert d’ulcères. Ainsi, ce n’est pas tant la richesse qui est décriée par Jésus, puisqu’il ne suffit pas d’être pauvre pour avoir un coeur de pauvre, c’est-à-dire un coeur qui attend tout de Dieu, mais l’attitude d’un coeur qui ne trouve sa sécurité, sa joie, sa satisfaction que dans les biens de ce monde, évacuant Dieu de son coeur, de sa vie. C’est cela l’ennemi de l’âme et non pas le seul portefeuille garni. L’attitude du jeune homme riche de l’Evangile (Mt 19,16-26; Mc 10, 17-31) procède de la même manière : il a préféré ses biens, sa grande richesse à la vie éternelle. La conséquence pour lui en fut la tristesse qui a gagné son coeur et non pas la joie de posséder ce que son âme aspire.

Ensuite, cette incompatibilité entre le riche et le pauvre Lazare sur la terre se retrouve au-delà de la mort. L’un connaît l’enfer, autrement dit la séparation à tout jamais de Dieu, pour lequel sa vie terrestre n’a guère laissé de place. L’autre est dans le sein d’Abraham, autrement dit le séjour des morts dans l’attente de la résurrection du Christ avant de connaître le ciel ; là, où la vie de bonheur se consume dans une relation éternelle avec Dieu pour lequel l’âme a cultivé la confiance dans sa vie sur terre. Aussi, Jésus dit qu’un « grand abîme a été établi » entre l’enfer et le ciel « pour que ceux qui voudraient passer de l’un vers l’autre ne le puissent pas » ( Lc 16,26). La séparation des « deux mondes » est donc radicale et définitive après la mort, l’un pour un malheur sans fin et l’autre pour une plénitude de bonheur éternel. 

Enfin, Jésus prend soin de rappeler et d’insister que le malheur dans lequel est tombé le riche n’est pas de l’ordre de l’arbitraire ou encore d’une justice implacable que Dieu ferait tomber sur l’homme non prévenu. Non, au contraire tout est dit : « Ils ont Moïse et les Prophètes : qu’ils les écoutent ! » (Lc 16,29). Le problème ne vient donc pas de Dieu et des témoins que Dieu envoie, mais bien de la surdité à l’accueil de la grâce et donc le refus d’écouter et de se convertir, comme si l’enseignement de Dieu était relatif, sans importance, sans consistance. Le drame de l’humanité est le rejet de Dieu du coeur, du centre de la vie de l’homme pour l’exiler aux périphéries de sa vie, lui donner une place toute relative, le remiser aux oubliettes et lui vouer une indifférence, voire le combattre comme un concurrent de sa propre liberté. Autrement dit, le drame de l’humanité est la reproduction du péché originel pour tout homme qui se laisse séduire par le mensonge de ce monde et laisse flatter son égo pour déterminer et décider ce qui est bien et mal. Le drame de l’humanité est donc de relativiser Dieu qui est absolu et d’absolutiser l’homme qui est relatif à Dieu. 

Il va sans dire que l’attitude de la Vierge Marie est tout autre : « Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom ! » (Lc 1,49). Tout est à sa place dans son coeur et il en jaillit une joie toute spirituelle. Les saints, comme chacun de nous, ont dû renoncer à leur volonté, même se faire violence pour trouver Dieu, mais une fois saisi par lui, ils n’ont cessé de le chérir, lui accorder la mesure par laquelle toute leur vie prend sens. C’est l’appel que Jésus nous lance dans l’Evangile de ce dimanche : un coeur de pauvre qui cherche la vraie richesse, qui ne peut décevoir.

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