L’édito de la semaine, le 23 Octobre 2022

Commentaire de l’Evangile du Jour (23 Octobre 2022, 30ème dimanche du Temps Ordinaire) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. » (Lc 18,14) dit Jésus. Incontestablement, l’humilité est l’attitude du coeur ; elle est comme une porte d’entrée de la grâce de Dieu dans mon coeur. Sans elle, c’est comme une barricade étanche et hermétique qui empêche toute intervention de Dieu dans mon coeur. C’est comme un panneau stop ou un feu rouge qui interdit l’entrée de la grâce de Dieu. J’aurais beau l’implorer, lui dire que je crois en lui, mais si l’humilité n’habite pas mon coeur, il n’aura pas d’autre choix que de me laisser faire ma volonté, car il lui est impossible de la contrarier. C’est contraire à l’amour, qui demande d’accueillir la volonté de Dieu, puisque l’amour est précisément un acte de volonté. Certes, par les épreuves de la vie, Dieu me tend la main de sa divine Providence. Il peut se servir du mal, qu’il n’a pas voulu, mais qui m’afflige, pour faire surgir le bien en moi, en me proposant son aide, qui passe toujours par la confiance et l’abandon, c’est le résultat d’un acte d’humilité. Tout l’enjeu qui se déroule est l’apprivoisement de ma volonté pour épouser celle de Dieu. Autrement dit, l’humilité permet à Dieu de me décentrer de moi-même pour trouver en lui mon Père, mon frère, mon amour, et ainsi mon guide, qui me conduit à ce que mon coeur désire au plus profond de lui-même. Sans cela, il ne peut se trouver en repos (cf. Les confessions de saint Augustin : « Mon coeur est sans repos, tant qu’il ne demeure en toi. »). De fait, l’humilité signifie : qui vient de la terre, de l’humus, autrement dit, elle nous renvoie à notre condition de créature. Au contraire, l’orgueil, l’acte de rébellion de l’ange rebelle, de Satan, qu’il a suggéré à Eve, est un acte qui conduit à prétendre être ce que nous ne sommes pas : un dieu qui connaît le bien et le mal. Il est le frère du mensonge, ou plutôt le fils, car il est fondé sur un mensonge : prétendre ce que je ne suis pas. D’ailleurs, le serpent de la genèse ne s’est pas trompé : il a menti pour faire surgir dans le coeur d’Eve, l’orgueil. Ainsi, l’humilité est la fille de la vérité, car elle conduit à accueillir la vérité de ce que je suis : une créature qui a besoin de son Créateur, lequel est devenu son Sauveur. L’orgueil est le fils du mensonge, car il conduit à me mentir à moi-même pour prétendre être ce que je ne suis pas. Les fruits en seront bien différents : la vérité de ce que je suis ne peut que me conduire à la joie et la paix intérieures, car je suis aimé par le Sauveur qui m’a créé. Tandis que le mensonge de ce que je ne suis pas, qui est donc en butte avec la réalité, ne peut que me conduire à la tristesse et l’anxiété d’une vie qui n’est jamais pleinement vécue car il lui manque irrémédiablement l’essentiel : Dieu au centre de ma vie.

L’attitude du publicain pécheur, qui fait la lumière de la réalité sur lui, dans un acte d’humilité se voit grandi, car il a saisi la main de Dieu pour qu’il puisse le relever de ses péchés et retrouver ainsi la joie du pardon et de l’amour d’un père. Au contraire, l’attitude du pharisien le met dans une telle position que Dieu se retrouve comme impuissant : cet homme n’a pas besoin du secours de Dieu, d’être sauvé, puisque qu’il fait valoir ses bonnes actions méritoires. Quel drame pour cet homme qui se condamne lui-même à ne pas désirer le salut de Dieu !

Tous les saints, et en particulier à son niveau le plus sublime, la Vierge Marie, ont vécu cette condition de l’humilité de telle sorte que la joie du coeur de Marie est celle de Dieu en elle ; sa volonté n‘est autre en toute chose que celle de Dieu. Ainsi Dieu vivait en elle comme si le coeur de Dieu avait élu pour domicile son coeur. Saint Paul aux Galates avait parfaitement résumé cela : « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi. » (Gal 2,20).

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