L’édito de la semaine, le 11 Février 2024

Commentaire de l’Evangile du Jour (11 Février 2024, 6ème dimanche du Temps Ordinaire) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Je le veux, sois purifié. » (Mc 1,41) dit Jésus au lépreux. Et aussitôt, il le fut. En ce dimanche, où plus particulièrement nous prions pour les malades, et notamment pendant la messe où plusieurs personnes vont recevoir le sacrement des malades, beaucoup peuvent peut-être se dire : « Mais pourquoi Jésus ne me guérit pas quand je le prie de le faire comme l’a demandé le lépreux de l’Evangile ? Pourquoi, n’y a-t-il plus ce miracle de la guérison aussi souvent que dans les Evangiles ? ». De fait, même si certains miracles de guérison ont lieu, notamment au cours de pèlerinages à Lourdes, qui restent tout de même assez rares, Dieu ne semble plus opérer aussi facilement les guérisons demandées. 

Y’a-t-il une raison à cela ? Oui, et même plusieurs. 

La première, c’est que le miracle fait partie de la proclamation de l’Evangile par Jésus. Il accomplit les oeuvres du Père, annoncées par les prophètes dans les Ecritures. Elles témoignent qu’il est bien le Messie, le Sauveur d’Israël et que le Père, lui rend ainsi témoignage.

La seconde, c’est que Jésus veut opérer par la guérison du corps, la guérison de l’âme. Il vient remettre l’homme déchu debout. Quand le lépreux demande la purification, c’est non seulement son corps mais aussi son âme, puisque la principale guérison que Jésus veut obtenir, et c’est pour cela précisément qu’il est venu, c’est de nous guérir de la seule maladie qui peut priver l’homme du bonheur éternel, à savoir le péché. Or, lorsque la foi manque, Jésus ne guérit pas. Nous avons un témoignage clair dans l’Evangile : « Et il ne fit pas beaucoup de miracles à cet endroit-là, à cause de leur manque de foi. » (Mt 13,58, Cf Mc 6,5-6). Effectivement, l’élite persévérera dans l’incrédulité et même nombre de disciples manqueront de foi, lorsque Jésus annoncera le mystère de la foi dénué de tout miracle, notamment le don de son Corps et de son Sang (cf. Jn 6). Au pied de la Croix, lorsque Jésus ne manifeste plus sa puissance divine, il est bien seul, tout juste présents quelques femmes et le fidèle saint Jean.

Ces deux raisons sont liées à la présence physique de Jésus dans le monde et de sa mission qui lui incombe. Aujourd’hui pour nous, et c’est la troisième raison, la présence physique de Jésus a laissé place à sa présence spirituelle, par l’action de l’Esprit Saint. Et il semble que les miracles ne sont plus légion parce qu’effectivement nous sommes entrés dans le monde de la foi, qui nous conduit à bénéficier dès ici-bas des grâces qui nous donnent part à la vie éternelle. La guérison physique devient rare, car par la grâce donnée sur le bois de la Croix, Jésus peut agir directement dans les âmes pour les guérir en profondeur de la lèpre du péché. De fait, le but est le don du bonheur éternel, rappelant que la vie terrestre n’est pas le but ultime, mais le tremplin pour le ciel. Dans un monde, qui ignore le vrai Dieu, pour lui substituer son « moi », devenu le dieu de l’homme contemporain, non seulement le miracle ne conduit pas nécessairement à la foi en Dieu qui opère le miracle, mais, au contraire, peut donner l’illusion de la satisfaction d’une vie terrestre comme bonheur de l’homme. Aussi, Dieu agit, avant tout, pour guérir les coeurs du péché. C’est pourquoi, l’un des premiers effets du sacrement des malades est le pardon des péchés : 

« – N. par cette Onction sainte, que le Seigneur, en sa grande bonté, vous réconforte par la grâce de l’Esprit Saint ;
R/. Amen.
– Ainsi, vous ayant libéré de tous péchés, qu’il vous sauve et vous relève.
R/. Amen. »

Une quatrième raison, c’est que Jésus veut inviter le malade à garder confiance en lui et découvrir que dans le mystère de la Croix, Jésus l’a pris dans son coeur pour transformer le mal en un plus grand bien. Or, il faut en convenir que cela peut conduire aussi à l’inverse en conduisant au doute, mais dans ce cas-là, Jésus veut purifier la foi, qui passe nécessairement par un certain dépouillement de sa volonté. Le miracle ne peut à lui seul guérir une foi fragile, car elle ne procède pas de la vision, du constat sensoriel de choses extraordinaires, l’Evangile, comme dit plus haut ne le montre que trop souvent. Non, elle naît au pied de la Croix, de la grâce dans le creuset du coeur, qui peu à peu se dépouille pour laisser place à la confiance et l’abandon. Finalement, c’est cela le vrai miracle, qui n’a pas un effet immédiat pour cette vie seulement mais plutôt un effet pour la vie éternelle. 

La Vierge Marie et tous les saints en font l’intime expérience, et tous nous disent que le vrai miracle, c’est la transformation de notre coeur par l’action de la grâce divine. Prions pour nos malades et pour chacun de nous afin que nous puissions trouver le vrai miracle de la guérison, celui du coeur.

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