Vendredi Saint

Commentaire de l’Evangile du Jour (2 Avril 2023 Dimanche des Rameaux) de l’Abbé Thierry Delumeau (seconde partie) :

« Méprisé, abandonné des hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, il était pareil à celui devant qui on se voile la face ; et nous l’avons méprisé, compté pour rien… Maltraité, il s’humilie, il n’ouvre pas la bouche : comme un agneau conduit à l’abattoir, comme une brebis muette devant les tondeurs, il n’ouvre pas la bouche. » (Is 53,3.7). Et pourtant, Isaïe ne prophétisait-il pas ce mystère, que les pharisiens, les scribes et les chefs des prêtres auraient dû saisir : « En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous pensions qu’il était frappé, meurtri par Dieu, humilié. Or, c’est à cause de nos révoltes qu’il a été transpercé, à cause de nos fautes qu’il a été broyé. Le châtiment qui nous donne la paix a pesé sur lui : par ses blessures, nous sommes guéris. » (Is 53,5-6) ? Voilà, le règne qu’il vient instaurer : un règne d’amour pour pardonner nos péchés, pour nous relever de notre déchéance, qui passe par la Croix, sur laquelle il l’établit. Cette Croix deviendra son trône, d’où sortira de son côté transpercé le remède pour nos péchés : sa miséricorde. C’est de la Croix qu’il attirera les âmes à lui : « quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. » (Jn 12,32). La Croix devient le trône de son règne, là où sa gloire sera manifestée aux yeux du monde, un règne dans les coeurs, là où il veut régner par la douceur de son amour, un règne qu’il établit pour l’éternité. La Croix est ainsi le lieu improbable de l’exercice de la puissance du Christ, de la puissance sur la mort, qui est détruite dans sa propre mort, car elle est le triomphe de son amour. Autant, pour tous les hommes, la mort est un échec, conséquence du péché, autant celle de Jésus, laquelle n’est pas la conséquence d’une vie prise mais bien donnée : « Ma vie nul ne la prend, mais c’est moi qui la donne » (Jn 10,18), elle est le triomphe de son amour, sur laquelle il bâtit son règne d’éternelle gloire. Or, il ne pouvait rester endormi dans la mort. C’est le troisième jour qu’il ressuscitera, le premier-né d’entre les morts. Désormais, la mort n’aura plus de part en lui. Il va même la détruire dans sa propre mort, bien que cela se fera définitivement à la fin du monde, comme saint Paul l’a annoncée : « Car c’est lui qui doit régner jusqu’au jour où Dieu aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. Et le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort. » (1 Co 15,25-26). Le triomphe de la résurrection se fera non pas devant les hommes, comme ce fut le cas pour la Croix, il se fera dans le secret du tombeau, à l’abri des regards, car la résurrection n’est pas un simple retour à la vie, mais bien l’état du ciel, d’une vie de plénitude avec un corps glorieux que l’on ne peut pleinement comprendre ici-bas.

Tous les saints sont venus au pied de la Croix pour y puiser la profondeur du mystère de la miséricorde. Tous sont venus s’abreuver de l’amour indicible du Dieu fait homme qui a daigné s’abaisser jusqu’à mourir pour donner la vie éternelle. La Vierge Marie s’est tellement unie à la profondeur de ce mystère que l’on ne peut trouver d’union plus grande entre Dieu et l’homme. C’est en elle, qui a pris part d’une manière mystérieuse et incomparable au mystère du salut, que nous pouvons trouver le plus sûr chemin qui nous montre le ciel, la patrie que Jésus nous a donnée pour notre plus grand bonheur.

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