L’édito de la semaine, le 5 Mars 2023

Commentaire de l’Evangile du Jour (5 Mars 2023 2ème dimanche de Carême) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! » (Mt 17,5). Indiscutablement, le mystère de la Transfiguration de Jésus met l’accent sur sa divinité et son caractère messianique. Il est bien le Fils de Dieu, partageant la divinité du Père, et le Messie tant attendu depuis des siècles, celui dont les prophètes ont annoncé comme le Sauveur d’Israël. 

De fait, après le baptême de Jésus dans le Jourdain, la voix du Père se fait entendre à nouveau et, comme pour le baptême, le Père authentifie son Fils, il lui rend témoignage. Il se fera entendre plus tard, lorsqu’à Jérusalem, Jésus se préparera à s’offrir pour le salut du monde : « Maintenant mon âme est bouleversée. Que vais-je dire ? “Père, sauve-moi de cette heure” ? – Mais non ! C’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci ! Père, glorifie ton nom ! » Alors, du ciel vint une voix qui disait : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore. » (Jn 12,27-28). Jésus veut préparer ses disciples, notamment Pierre, Jacques et Jean, à vivre cette heure terrible que sera son agonie au mont des Oliviers. Il les emmène donc auparavant sur le mont Thabor pour vivre le mystère de la Transfiguration qui est comme un avant-goût du ciel et du mystère de la résurrection du Christ, afin de fortifier leur foi fébrile devant l’agonie terrifiante de Jésus. Après cet événement, il commencera à parler ouvertement de sa passion, de sa mort et de sa résurrection, mystères qui demeureront profondément obscurs pour l’intelligence de ses disciples. 

Ainsi, la Transfiguration de Jésus met l’accent sur l’affirmation sans ambiguïté de sa divinité. Il est Dieu, malgré la passion terrifiante que vivra Jésus et qui fera apparaître son humanité humiliée, méprisée, broyée et anéantie par le poids incommensurable de la souffrance, au point qu’Isaïe prophétisera de lui : « Devant lui, le serviteur a poussé comme une plante chétive, une racine dans une terre aride ; il était sans apparence ni beauté qui attire nos regards, son aspect n’avait rien pour nous plaire. Méprisé, abandonné des hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, il était pareil à celui devant qui on se voile la face ; et nous l’avons méprisé, compté pour rien. » (Is 53,2-3). Le paradoxe de la puissance divine et de l’humanité broyée et anéantie au sein d’une même personne a de quoi fortement ébranler la foi bien faible des disciples, de telle sorte, hormis saint Jean, tous trahiront le Christ et déserteront la Croix.

Aussi, l’autre aspect du mystère de la Transfiguration, c’est le caractère messianique de Jésus. Il est bien le Messie, annoncé par les prophètes. Et pour ce faire, deux des plus importants personnages de l’Ancien Testament entourent Jésus de leur présence : Moïse et Elie. Là, le doute n’est plus permis. Ils incarnent ceux qui annoncent le Messie. En s’entretenant avec Jésus, rayonnant de lumière, ils rendent témoignage que c’est bien lui qui est le Messie annoncé. Ainsi, Jésus est bien celui qui accomplit les Ecritures, celui à qui on rend doublement témoignage : la voix du Père et la présence des deux grands prophètes, Moïse et Elie. 

Devant un tel événement, les disciples sont effrayés. Jésus doit les rassurer, mais aussi leur demander de n’en rien dire à personne avant la résurrection, afin que sa mission ne soit pas compromise par le sensationnel de l’événement, qui pourrait se substituer, dans le cœur des hommes, au mystère de la foi. De fait, nous sommes bien devant un mystère de la foi, qui ne peut s’appréhender autrement que par la foi, ce que les sens et la seule intelligence humaine ne peuvent faire. Aussi, c’est à l’école des saints, à commencer par la Vierge Marie, qui, plus que toute autre, a vécu tous ces événements dans la foi, de telle sorte, que l’heure fatidique et cruciale de la Croix, se révéla, au plus intime de la profondeur de son coeur, le mystère ineffable et indicible de l’amour miséricordieux. Cet amour seul d’un Dieu fait homme est à même de tirer des affres promises de l’enfer l’humanité pécheresse. Ce fut au prix d’une souffrance innommable au point que le corps du Fils de l’homme n’était même plus reconnaissable à un homme, que la puissance indicible de la miséricorde divine s’est exprimée.

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