L’édito de la semaine, le 26 Février 2023

Commentaire de l’Evangile du Jour (26 Février 2023, 1er dimanche de Carême) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » (Mt 4,4) dit Jésus au démon. A la première et à chaque tentation, Jésus repousse les avances du diable par la citation des Ecritures. Qu’à cela ne tienne, Satan va donc citer les Ecritures dans la deuxième tentation : « Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. » (Mt 4,6). Et bien sûr, Jésus va répondre en citant de nouveau les Ecritures. Il va montrer qu’on ne peut isoler une phrase de l’ensemble des Ecritures et l’utiliser contre Dieu lui-même, puisqu’elles sont la Parole même de Dieu : « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. » (Mt 4,7). La Parole de Dieu sera donc l’arme de Jésus contre le diable tentateur. Celui-ci va s’y prendre à trois reprises pour tenter Jésus, affaibli par un corps affamé, pour le vaincre. Or, c’est le diable qui sera vaincu jusqu’au moment où il reviendra pour tenter à nouveau Jésus au moment de son agonie. Ces trois tentations épuisent toutes les formes de tentations auxquelles l’homme est soumis par l’adversaire. Elles ont pour objet les besoins du corps (la première tentation), le pouvoir (la seconde tentation) et enfin l’avoir (la troisième tentation). Si l’homme tombe suite à ces trois tentations, cela peut l’amener à un esclavage extrêmement redoutable. Il suffit de voir le monde dans lequel nous vivons. Ne voit-on pas des hommes prisonniers d’une addiction à la luxure, à la pornographie, dont ils ont bien du mal à s’en défaire ? Ne voit-on pas des hommes assoiffés de pouvoir ou encore obnubilés par une possession frénétique de l’argent, de choses, au point de n’en avoir jamais assez ? Les trois réunies sont les mêmes lésions chez nombre de personnalités. Les trois tentations ont pour origine le mensonge et l’orgueil. Penser que la créature peut exister sans son Créateur est un mensonge. Vouloir vivre comme son propre dieu qui connaît le bien et le mal est de l’orgueil. C’est précisément le péché d’Adam et Eve, dans le livre de la Genèse qui nous est donné comme première lecture de ce dimanche. De fait, Satan a menti pour susciter l’orgueil dans le coeur d’Adam et Eve. Son but est de détourner l’homme de Dieu pour qu’il choisisse de vivre comme si Dieu n’existait pas. Jésus, qui est la Vérité, viendra avec humilité en s’abaissant dans l’humanité jusqu’à mourir sur une croix pour détruire l’oeuvre du diable, qui n’est que mensonge et orgueil. Ainsi, c’est en opposant au mensonge la Vérité et à l’orgueil l’humilité que Jésus sera vainqueur sur la Croix. L’homme est rétabli dans sa dignité de fils de Dieu, parce que, en donnant sa grâce, Jésus a voulu vivre dans son humanité la tentation à laquelle l’homme a succombé. 

Pour vivre ce chemin du carême qui commence et nous amènera à la victoire de Pâques, Jésus nous a proposé trois moyens, dans la liturgie de la messe des Cendres, qui justement sont une réponse aux trois tentations que Jésus a subites dans le désert. Il propose le jeûne, qui est la réponse à la première tentation, la prière, la réponse à la seconde, et l’aumône qui est la réponse à la dernière tentation. Le jeûne est le moyen proposé pour prendre conscience que l’on ne peut pas vivre seulement pour le corps. Au contraire, il est plutôt destiné à être le serviteur de l’âme. Le corps ne peut pas être la ruine de l’âme, mais bien son allié pour le ciel. La prière est le moyen pour connaître et désirer faire la volonté divine. L’aumône est le moyen pour nous détacher des biens de ce monde, afin que nous n’en devenions pas esclaves. Avec le jeûne, la prière et l’aumône, nous sommes invités ainsi à voir l’importance d’une vie ordonnée pour le ciel, une vie de fils libres et non d’esclaves de ce monde, une vie où Dieu ne peut être absent mais bien présent au coeur de nos vies. Comme le disait le saint pape Jean Paul II, « l’homme sans Dieu, c’est l’enfer pour l’homme. » D’ailleurs, dans la vie religieuse, les trois voeux de religion reprennent ces trois moyens pour conduire la vie des religieux vers une recherche de Dieu dans leur vie, en la lui consacrant pleinement. Le jeûne est là remplacé par le voeu de chasteté, qui dans la vie religieuse, se concrétise par un célibat totalement consacré à Dieu, dans le but d’une recherche exclusive de Dieu (corps et âme). Le voeu d’obéissance veut conduire à exclure toute domination, tout pouvoir terrestre, pour n’appartenir qu’à Dieu seul. Le voeu de pauvreté veut conduire à n’avoir rien en propre pour s’attacher à Dieu seul. Cependant, ces voeux, comme les vertus, demandent, bien sûr, sans cesse un esprit de conversion et de pénitence pour que les grâces reçues produisent tous leurs effets.

A la suite de la Vierge Marie et des saints, et par leur intercession, empruntons le chemin de la conversion et de la pénitence auquel nous invite le carême, car il n’y a pas d’autre chemin de véritable bonheur en dehors de Dieu, puisqu’il n’y a pas de bonheur sans Pâques.

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