L’édito de la semaine, le 21 Avril 2024

Commentaire de l’Evangile du Jour (21 Avril 2024, 4ème Dimanche de Pâques) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. » (Jn 10,11) dit Jésus à ses disciples. La grande différence avec le mercenaire, c’est que le berger aime ses brebis au point de donner sa vie pour elles, alors que le mercenaire, au contraire, ne les aime pas. Le bon berger va plutôt privilégier la vie de ses brebis à la sienne ; le mercenaire tient plus à sa vie qu’à celle des brebis. Le bon berger aime ses brebis, car il les connaît ; le mercenaire ne connaît pas les brebis, car il ne les aime pas et elles ne sont pas à lui. Aussi, Jésus montre clairement qu’aimer, c’est connaître et connaître c’est aimer : « Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis. » (Jn 10,14-15). Autrement dit, pour Jésus, aimer et connaître sont synonymes, puisqu’aimer conduit à connaître, et vouloir connaître conduit à aimer. Il en est ainsi, parce que l’homme possède deux facultés spirituelles : l’intelligence pour connaître et la volonté pour aimer. Ces deux facultés spirituelles sont le propre même de ce qui constitue l’image et la ressemblance de l’âme humaine avec Dieu, comme cela est le cas pour l’ange. C’est ce qui caractérise les esprits. Ils sont intelligence et volonté. L’intelligence cherche la Vérité, qui est, bien sûr, Dieu, et la volonté cherche à aimer le vrai bien, qui est évidemment Dieu. Or, l’homme, par la suggestion du démon, s’est laissé pervertir dans l’usage de ses deux facultés spirituelles, par l’accueil du mensonge à la place de la Vérité et l’exercice de l’orgueil au lieu de l’humilité, dans l’amour de lui-même au détriment de l’amour du vrai bien qu’est Dieu : « Vous serez comme des dieux qui connaissent le bien et le mal. » (Gn 3,5). La conséquence en fut désastreuse pour l’homme, qui par le mensonge en est venu à se choisir lui-même comme son propre dieu, ce qui l’a conduit à l’impasse de la mort, conséquence même du péché, puisque la vie ne peut que découler de celui qui en est la source. Or, en s’éloignant de Dieu, l’homme s’est enfermé dans une solitude telle que la mort en est le résultat. Cependant, Jésus, le Dieu fait homme, la Vérité même, s’est fait humble : le bon berger. Il est venu chercher les brebis égarées, tombées dans les ravins mortifères du mensonge et de l’orgueil, pour les ramener sur ses épaules dans les verts pâturages du véritable amour, là où elles trouvent la vraie vie. Néanmoins, pour qu’elles puissent être chargées sur les épaules du bon berger, elles sont invitées à écouter la voix du bon pasteur, la Vérité, et non pas le mensonge du tentateur. C’est en écoutant la voix du bon berger, qu’elles découvrent l’amour véritable, celui d’être aimé pour elles-mêmes par Celui qui les a créées et qui a voulu les sauver en se chargeant lui-même du fardeau qui les accable. Et cela, ne s’adresse pas aux seules brebis de l’enclos d’Israël, mais aussi à celles des enclos des païens, autrement dit à celles du monde entier, car toutes sont dans les entrailles d’amour du bon berger : « J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. » (Jn 10,16).

L’Evangile du bon pasteur est une invitation à découvrir l’appel que Dieu adresse au tréfonds de notre coeur : il nous aime, il est le bon berger, et nous demande d’accueillir sa volonté, qui doit prendre place en remplacement de la nôtre. L’importance est telle pour Jésus, qu’il a établi ses disciples comme Apôtres, autrement dit comme « envoyés » pour agir au nom du bon pasteur. Lorsqu’il a demandé à Pierre d’être le berger de ses agneaux, ne lui a-t-il pas posé la question  à trois reprises en souvenir de son triple reniement : « Pierre m’aime-tu ? » (Jn 21,15). Et à la réponse positive de Pierre, ne lui a-t-il pas dit par trois fois : « Pais mes agneaux. » ? (Jn 21,15). Ainsi, Jésus établit des pasteurs à sa suite, Pierre et les autres apôtres, qui ne sont pas des pasteurs indépendants, mais des pasteurs appelés à agir en son nom propre, appelés à aimer les brebis qui leur sont confiées, comme l’unique bon berger, Jésus, aime ses brebis. Aussi, pour manifester l’importance de ces bergers, Jésus a formulé une demande de prière, la seule que nous trouvions dans l’Evangile : « de prier le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers. » (Mt 9,38). Il va sans dire que nous ne pouvons que prendre au sérieux la demande de Jésus, qui n’est pas seulement une prière pour une question de nombre de bergers pour le troupeau ou d’ouvriers pour la moisson, mais aussi pour que ces pasteurs et ces ouvriers agissent dans la volonté divine, et là, il faut bien le dire, nous sommes dans l’ordre du mystère : Jésus a le souhait que ces hommes agissent en son nom : Aimer Jésus, vivre de sa vie, pour aimer les brebis de l’unique bon berger. 

Pour cela, nous avons une aide, la Vierge Marie, la mère du bon pasteur, mais aussi notre mère qui désire que ses enfants aiment et suivent la volonté de son Fils. Prions-là pour lui demander que parmi ses enfants, nombreux sont ceux qui répondent avec générosité à l’appel de son Fils et persévèrent dans la sainteté en accomplissant leur mission.

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