Commentaire de l’Evangile du Jour (3 Octobre 2021 – 27ème dimanche du Temps Ordinaire) de l’Abbé Thierry Delumeau :
« Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas ! » (Mc 10,9). « Laissez les enfants venir à moi, ne les empêchez pas, car le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent. Amen, je vous le dis : celui qui n’accueille pas le royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas. » (Mc 10,14-15). En apparence, ces deux enseignements de Jésus ne paraissent pas avoir de rapport direct, bien qu’ils se suivent immédiatement. Et pourtant, cela n’est qu’en apparence. Tous les deux ont trait à l’amour : l’amour du conjoint et l’amour à la manière des enfants. Jésus, lorsqu’il montre l’exemplarité d’accueil du royaume de Dieu par les enfants, enseigne comment aimer en vérité. Qu’est-ce qui caractérise l’accueil du royaume de Dieu, autrement dit l’amour d’un enfant ? La simplicité et la vérité de cet amour et la confiance que l’enfant accorde naturellement. L’enfant ne se pose pas une et mille questions, il aime, dans son innocence non affectée par la dureté de la vie, naturellement avec simplicité et vérité ceux qui l’entourent, bien sûr ses parents en tout premier lieu et les autres membres de sa famille. Aussi, il fait naturellement confiance. Telle est l’attitude juste de l’enfant que Jésus met en valeur pour accueillir le royaume de Dieu, qui n’est autre qu’un mystère d’amour entre l’Epoux, le Christ, et l’épouse, l’Eglise dont nous sommes membres par le baptême. Ainsi, l’amour conjugal doit puiser dans cet amour du Christ pour son épouse l’Eglise sa propre source, ce qui est d’ailleurs précisément la grâce du sacrement du mariage. L’aide, le secours du sacrement du mariage permet aux époux de puiser l’authenticité du véritable amour conjugal, qui se trouve dans le don désintéressé de soi, dans les noces de l’Agneau de Dieu, du Christ pour son épouse l’Eglise, qui ont été célébrées sur le bois de la Croix. Jésus n’a-t-il pas dit : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Jn 15,13) ? Ainsi, Jésus invite les époux, chacun d’entre nous, à entrer dans la dimension de ce mystère de la Croix, source et sommet de la vie de grâce, pour apprendre à aimer en vérité, porté par la grâce, afin de découvrir le vrai bonheur d’aimer. Le bonheur ne peut pas être étranger à l’amour, puisqu’il n’est pas étranger à se donner et se recevoir dans un acte de confiance, de simplicité et de vérité. Comme le dit saint Jean : « Voici en quoi consiste l’amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils en sacrifice de pardon pour nos péchés. » (1 Jn 4,10). Dans la foi, nous découvrons l’amour de Dieu pour nous. Jésus nous invite à vivre le quotidien dans ce même élan de foi pour aimer premièrement nos conjoints et deuxièmement nos frères dans le don de sa personne, qui ne cherche pas tant d’abord à aimer pour être aimé que d’aimer pour aimer. Jésus l’a exprimé sur le bois de la Croix, dans l’une de ses dernières paroles prononcées avant d’expirer : « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34)
En ce dimanche, nous fêtons saint Léger, patron de notre paroisse, qui a versé son sang et ainsi témoigné de l’amour de Dieu au prix de sa vie. Il nous enseigne, comme la Vierge Marie et tous les saints, que le don de sa vie, nourri de la grâce puisée au creuset du mystère de la Croix, est le véritable amour reposant sur la confiance inébranlable en Dieu, qui ne peut nous décevoir. Toute vie et vocation peuvent trouver la source de la confiance et la prière dans cette dernière parole du Christ en Croix, qui illustre l’éternité de sa condition filiale : « Père, en tes mains, je remets mon esprit. » (Lc 23,46).