Fête de Saint Léger, saint patron de la paroisse

Commentaire de l’Evangile du Jour (2 Octobre 2022 27ème dimanche du Temps Ordinaire et fête de saint Léger) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : ‘Déracine-toi et vas te planter dans la mer’, et il vous aurait obéi. » (Lc 17,6). C’est dire la puissance de l’acte de foi. La foi donne un tel sens à la vie, qu’elle en change profondément la finalité. En ce jour, nous fêtons le saint patron de notre paroisse : saint Léger. Cet homme, qui a vécu une vie hors du commun, a posé des actes qui en ont changé profondément la destinée. Suite à la vie monastique qu’il a vécue à l’abbaye de Saint Maixent, il a défendu, en tant qu’évêque d’Autun, son peuple, les bourguignons, dont il avait la charge pastorale de la folie et de la brutalité d’Ebroïn, le maire du Palais de l’époque (sorte de premier ministre de la province de la région parisienne : la Neustrie). Celui-ci l’a martyrisé en lui arrachant les yeux et la langue, avant qu’Ebroïn tombe en disgrâce. Saint Léger, qui avait la faveur du roi, aurait pu se venger contre son bourreau exilé dans un monastère. Or, notre saint, habité par une grande foi et une charité hors du commun, ne porta pas atteinte à sa vie. Mais lorsque la situation s’inversa à nouveau, Ebroïn, vouant une haine diabolique envers son vieil ennemi, le fit décapiter. Cependant, saint Léger ne manqua pas de convertir trois des quatre bourreaux chargés de la basse besogne. Le quatrième, pris d’une crise de folie, après avoir mis en exécution son assassinat, se jeta dans un feu destiné à faire brûler le corps du saint. Toute la vie de notre cher saint n’était qu’une application des paroles de son maître : « Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir. » (Lc 17,10). De fait, sa vie ne fut qu’épreuves et persécutions, et pourtant, elle fut d’une grande richesse spirituelle, source de conversion sur le champ de certains de ses propres bourreaux. Elle s’exprima par un sens du devoir et de don de soi, au prix cher payé d’une vie offerte en sacrifice, à l’image de son maître qu’il a suivi sur les traces de la Croix. « Qui veut être mon disciple, qu’il prenne sa croix et me suive. » (Mt 16,24) dit Jésus. Le poids de la Croix, la compréhension que Jésus en donne et que les saints saisissent dépassent la première approche que l’on peut en faire. Il y a une vision humaine des choses et il y a une vision de la foi. Sans celle-ci, toute approche de la Croix est tout simplement folie, comme le disait saint Paul : « Nous, nous prêchons Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens. » (1 Co 1,23). Les paroles de Jésus sont inaudibles pour les pharisiens et les chefs des prêtres, car ils n’ont pas la foi en Jésus Christ Dieu fait homme crucifié pour le salut des pécheurs. C’est précisément cela, le Christ mort et ressuscité pour sauver les hommes, qui donne le sens profond à la vocation du serviteur : donner, sans attendre la reconnaissance : « Va-t-il être reconnaissant envers ce serviteur d’avoir exécuté ses ordres ? » (Lc 17,9). La gloire du serviteur est de servir le maître et donner sa vie, car lui le maître a donné sa vie pour le serviteur. Saisir la profondeur de ce mystère, dans un acte de foi, donne sens à toute vie d’abnégation et de renoncement, car la gloire est d’entrer dans l’intimité de ce Dieu qui a renoncé à tout, bien « qu’ayant la condition de Dieu, il ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti prenant la

condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes, reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la Croix. C’est pourquoi Dieu l’a exalté : il l’a doté du Nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur terre et aux enfers, et que toute langue proclame : « Jésus Christ est Seigneur » à la gloire de Dieu le Père. » (Phil 2,6-11). Jésus, incontestablement, est le premier des serviteurs, bien qu’il soit le maître, à avoir endossé le poids de la souffrance, de l’ignominie, des insultes et des moqueries de ceux pour qui il donnait sa vie.

La Vierge Marie est, bien sûr, celle qui comprit le mieux son Fils serviteur souffrant, n’ayant pas d’autre but que tout donner parce que son Fils aime d’un amour infini. A notre humble niveau, nous pouvons entrer dans la dimension de la foi pour saisir l’amour auquel le Seigneur nous appelle. C’est un amour qui s’exprime par le sens du devoir de celui qui aime d’un amour sans mesure. Pourquoi en est-il ainsi ? Tout simplement, parce que notre maître s’est fait serviteur pour nous aimer d’un amour infini, qui, lui, dépasse sans commune mesure notre amour humain sans mesure.

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