Édito de la semaine, le 13 Mars 2022

Commentaire de l’Evangile du Jour (13 Mars 2022, 2ème dimanche de Carême) de l’Abbé Thierry Delumeau :

« Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le !  » (Lc 9,35) dit le Père lors de la Transfiguration de Jésus devant les trois apôtres Pierre, Jacques et Jean. Cet instant est comme un avant-goût du ciel pour les trois mêmes apôtres qui connaîtront la terrible agonie de Jésus. Ces deux mystères vont les marquer profondément. Le premier leur rappelle la condition divine de Jésus, le second son humanité offerte pour le salut des hommes. L’un et l’autre constituent un tout de la révélation du Dieu fait homme Sauveur. La Transfiguration de Jésus sur le mont Thabor se fait en présence de Moïse et d’Elie, ces deux personnalités importantes du peuple élu qui annoncent le Messie, celui qui doit venir. L’un comme l’autre incarnent la puissance divine, le culte au vrai Dieu et le salut que Dieu donne aux hommes. Jésus apparaissant avec Moïse et Elie, s’entretenant avec eux, est la révélation même que Jésus est bien le Messie annoncé, le Sauveur de son peuple. Pour un hébreu témoin d’une telle scène, il ne peut y avoir de doute. Aussi, comme pour appuyer l’instant solennel, « une nuée survint et les couvrit de son ombre » (Lc 9,34) et la voix du Père se fait entendre : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le !  » (Lc 9,35). Les trois disciples sont alors saisis de frayeur. La Sainte Trinité se révèle : la voix du Père, le Fils transfiguré et la nuée, signe de l’Esprit Saint. Là, nous sommes en présence d’un sommet de la révélation divine, nécessaire, pour que Jésus puisse annoncer à ses disciples sa passion et sa mort, lesquelles paraissent inappropriées pour le Messie. La terrible déchéance de l’agonie de Jésus est telle qu’elle est insoutenable pour un homme qui n’a pas connu d’abord la Transfiguration. De même, la Vierge Marie, à Fatima, montrera d’abord le ciel aux trois petits pastoureaux avant de leur montrer l’enfer, qui, sans la vision du ciel au préalable, aurait pu les faire mourir de désespoir. D’ailleurs, ils en seront profondément affectés, de telle sorte que la petite Jacinthe priera et offrira tous ses sacrifices pour le salut des pécheurs, tant de les voir s’engouffrer en enfer l’effraie, tout comme le petit François sera profondément marqué par les outrages et sacrilèges commis contre le coeur de Jésus et de Marie et offrira prières et sacrifices « en réparation » pour soulager les deux Coeurs outragés par le mépris de la miséricorde de Dieu. La Transfiguration marquera tellement les trois disciples qu’ils « gardèrent le silence et, en ces jours-là, ils ne rapportèrent à personne rien de ce qu’ils avaient vu. » (Lc 9,36). Le lendemain, Jésus annonce sa passion : « Ouvrez bien vos oreilles à ce que je vous dis maintenant : le Fils de l’homme va être livré aux mains des hommes. » (Lc 9,44). Or, personne ne comprend, tant un tel mystère paraît inaudible : « Mais les disciples ne comprenaient pas cette parole, elle leur était voilée, si bien qu’ils n’en percevaient pas le sens, et ils avaient peur de l’interroger sur cette parole. » (Lc 9,45). Dans l’Evangile de saint Matthieu, à l’annonce de la passion, de Jésus, Pierre lui fera « de vifs reproches : « Dieu t’en garde, Seigneur ! cela ne t’arrivera pas. » (Mt 16,22). Jésus n’hésitera pas à lui rétorquer : « Passe derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute : tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. » (Mt 16,23). Ainsi, le mystère de la passion et de la mort de Jésus sont tellement impensables, inimaginables, que l’effroi saisira tous les apôtres, à l’exception de Judas qui le trahira et saint Jean, le disciple bien-aimé, le seul qui suivra le Christ jusqu’à la Croix. 

Dans cette montée vers le mystère pascal, nous sommes invités à faire le plein de force spirituelle avec le mystère de la Transfiguration pour vivre le grand dépouillement de la semaine sainte, l’inimaginable pour un Dieu, qui a voulu se faire homme afin de se laisser conduire comme un agneau à l’abattoir, pour offrir le seul et unique sacrifice qui sauve le monde. En cela, nous sommes invités à raviver l’Espérance que nous apporte la Foi. Aujourd’hui, malgré les ténèbres qui semblent s’abattre sur un monde en proie à tant d’incertitudes, de menaces et de violences de toute sorte, Jésus nous donne la vertu d’Espérance et de la Foi pour ne pas sombrer dans le désespoir. Nos prières, nos sacrifices ne sont pas vains, soyons-en sûrs, car ce n’est pas parce que nous n’en voyons pas les effets, que Dieu est absent. Dieu est présent au coeur de la souffrance. Il l’a habitée, il l’a assumée avec une âme humaine et un corps de chair livrés en sacrifice dans une souffrance que l’on ne peut imaginer. Celle qui s’en est approché le plus, autant qu’un homme le puisse, c’est bien sûr sa mère, la Vierge Marie. Elle est celle qui l’a la mieux comprise et la mieux assumée. En elle, nous avons un soutien indéfectible. 

Chers amis, malgré les apparences, le temps est à l’Espérance et non au désespoir et à la résignation. Les promesses de Dieu sont éternelles. Dieu est fidèle. Il nous appelle à la confiance. Avec sainte Faustine, nous pouvons lui dire : « Jésus, j’ai confiance en toi. »

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